Dans l’industrie automobile, la standardisation règne en maître : des modèles produits en masse, des processus optimisés pour réduire les coûts. On pourrait croire que la construction modulaire pourrait suivre la même voie avec ses structures préfabriquées. Pourtant, en cherchant à trop standardiser, de nombreuses entreprises ont échoué. On pensera notamment aux américaines Katerra et Skender, l’australienne Modscape ou encore Maisons Phénix en France.
Pourquoi ? Parce que même si le modèle économique de la construction modulaire repose sur des solutions standardisées pour réduire les coûts, industrialiser la construction est bien plus complexe.
Plusieurs raisons à cela.
D’abord, la quantité de bâtiments à construire n’est pas suffisante pour un modèle économique basé sur le volume. Chaque site de construction est unique en son genre, avec des particularités en termes de topographie, de conditions climatiques et de réglementations locales. Mais ce n’est là qu’une partie du problème. La construction est également soumise à des attentes de personnalisation, des différences culturelles, et des variations de marché. A trop vouloir appliquer des principes de fabrication industrielle sans tenir compte de ces spécificités a causé l’échec de nombreuses entreprises dans le secteur modulaire.
Alors, la solution serait-elle la customisation de masse à l’échelle locale ? Ce modèle, prônant la standardisation des processus, pas des pièces, permettrait d’adapter chaque module aux particularités d’un projet tout en conservant les avantages de la production en série. En plus de cette flexibilité, la customisation de masse encourage la production locale (micro-usines, ressources locales) et peut s’intégrer aux spécificités des différentes régions.
L’ère de la fabrication numérique transforme profondément notre manière de concevoir et de produire des objets, du mobilier personnalisé aux bâtiments modulaires. En combinant la puissance de la conception algorithmique, des configurateurs 3D et des machines à commande numérique (CNC), ce modèle émerge comme une alternative durable et personnalisée à la consommation de masse traditionnelle, souvent associée au gaspillage de ressources et aux stocks d’invendus. Avec la démocratisation des techniques de fabrication numérique (fablab, imprimantes 3D etc.), la production personnalisée devient également accessible à tous.
Standardiser le non-standard ?
La customisation de masse combine l’efficacité et les coûts réduits de la fabrication en série avec la personnalisation de produits adaptés aux préférences de chaque client. Ce modèle favorise une production à la demande, qui réduit les stocks inutiles et les déchets tout en garantissant des solutions personnalisées et adaptées.
Configurateurs 3D et automatisation des fichiers de fabrication
Aujourd’hui, le marché de la personnalisation reste majoritairement divisé en deux options :
- Le sur-mesure, souvent coûteux et exclusif.
- Les options limitées, proposées par quelques enseignes, qui permettent de choisir certaines configurations sans toucher à la géométrie du produit.
Attention cependant à bien différencier les types de configurateurs 3D, dont la plupart proposent un choix d’options sur des produits fabriqués en masse, en opposition avec la production à la demande – c’est le cas par exemple du géant suédois.
Les configurateurs 3D se classent ainsi en deux catégories :
- Configurateurs basés sur des options prédéfinies : Ils permettent de personnaliser le produit parmi une sélection d’options (couleur, matériau, accessoires) sans modifier la géométrie. Par exemple, un configurateur de mobilier peut permettre de choisir la couleur ou les poignées, sans affecter la structure du meuble.
- Configurateurs générant des formes uniques : Ces configurateurs avancés reposent sur des algorithmes de conception paramétrique permettant une personnalisation profonde, incluant la modification de la forme du produit. Les utilisateurs peuvent ainsi ajuster des paramètres structurels, créant des variantes uniques.
Une fois le modèle configuré, les fichiers de fabrication peuvent être automatiquement générés pour les machines CNC, éliminant les erreurs manuelles et accélérant le passage de la conception à la production. Grâce à cette automatisation, chaque produit est fabriqué sur commande, en évitant les stocks inutiles et en optimisant l’utilisation des matériaux.
Différent type de fichiers peuvent être générés :
- Des fichiers STL ou g-code pour l’impression 3D
- Des fichiers dxf organisés par calque pour chaque parcours d’outil, pour découpe laser ou fraiseuse numérique
- Etc.
L’automatisation de l’identification d’un très grand nombre de pièces constitutives du produit final (étiquetage) facilite la reconnaissance et garantie un montage sans encombre.
Chez Datamorphoz, nous vous aidons à créer des modèles paramétriques pour vos produits customisables, et à automatiser la génération des fichiers de fabrication.
Applications en construction : un juste milieu entre personnalisation et industrialisation
La construction modulaire est reconnue pour son efficacité et sa rapidité, mais elle suscite parfois des réserves chez les architectes, qui craignent que la standardisation limite leur créativité et aboutisse à des bâtiments uniformes. En réalité, la standardisation n’exclut pas la personnalisation. Les architectes peuvent utiliser des outils de conception paramétrique et des configurateurs 3D pour adapter les modules aux spécificités de chaque projet tout en respectant les contraintes industrielles.
Cette approche permet de standardiser le sur-mesure : les modules sont optimisés pour répondre aux exigences de chaque client, conciliant efficacité industrielle et singularité architecturale. La construction modulaire devient ainsi une plateforme permettant aux architectes d’exprimer leur créativité, en ouvrant la voie à une nouvelle façon de voir le projet architectural : non plus comme un produit fini mais comme un concept libre et interactif.
En intégrant des ateliers locaux et des matériaux renouvelables, la customisation de masse favorise également une économie circulaire, en s’adaptant aux ressources locales et aux préférences des utilisateurs.
Les configurateurs 3D : démocratisation et personnalisation avancée
Les configurateurs 3D se démocratisent dans le design ou la construction modulaire, offrant aux clients une expérience de personnalisation avancée.
Configurateur proposé par Creatomus
Plusieurs options existent, la création d’un configurateur 3D sur mesure, comme peuvent le faire des entreprises comme Konfigurable et Creatomus, spécialisé en AEC.
Configurateur d’escalier, Konfigurable
Des plateformes comme ShapeDiver facilitent ce type de personnalisation en ligne, en intégrant Rhinoceros 3D et Grasshopper pour répondre aux besoins spécifiques des clients. On pensera aux configurateurs de maisons et studios de jardin respectivement crées par Cake House et Type Five.
Configurateur 3D de Type Five
Grâce à ces outils, les utilisateurs peuvent ajuster les dimensions, les matériaux, et autres éléments pour obtenir une solution unique et adaptée. Certaines plateformes intègrent même le calcul en temps réel du coût et du bilan carbone pour chaque configuration, offrant une transparence accrue au client. Ces innovations rendent la conception modulaire plus accessible, tout en soulignant l’adaptabilité et la flexibilité de la construction contemporaine.
Un Nouveau Modèle de consommation du modulaire ?
La customisation de masse redéfinit nos pratiques, que ce soit dans le secteur du bâtiment ou du mobilier personnalisable, en plaçant l’utilisateur au centre du processus de création, tout en répondant aux enjeux de durabilité. Ce modèle repose sur 3 axes stratégiques :
- Une production à la demande qui réduit les stocks inutiles et s’adapte aux ressources locales ;
- Conception paramétrique & Configurateurs 3D avancés permettant de générer des variantes uniques en fonction des préférences de chaque utilisateur ;
- Automatisation des fichiers de fabrication pour machine CNC pour un passage direct de la conception à la production.
Il se présentant comme une alternative aux méthodes traditionnelles de production de masse, souvent coûteuses pour l’environnement et peu adaptés au secteur de la construction.
Cette approche holistique permet également de produire uniquement ce qui est nécessaire, de réduire les déchets, et de soutenir l’économie locale. La customisation de masse ouvre ainsi la voie à un modèle de consommation plus sobre, plus durable, et résolument tourné vers l’avenir.